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Aude-E. Fleurant : « Le concept de course aux armements n’est pas adapté au contexte contemporain »

OSINTPOL donne un coup de projecteur sur les bases de données tenues par le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI). Cette période d’annonces budgétaires fournit l’occasion de revenir et commenter les données relatives aux dépenses militaires de 2018. Yannick Quéau a donc interrogé Aude-Emmanuelle Fleurant, directrice du programme armements et dépenses militaires du SIPRI. La base de données est accessible en source ouverte sur le site du SIPRI. Le document d’analyse (en anglais) faisant ressortir les éléments essentiels peut être consulté en cliquant sur l’image ci-contre. Il est aussi possible de consulter le Compendium 2018 sur les dépenses militaires, la production et les transferts d’armes publié en français par le GRIP.

Les données de cette année traduisent une hausse de 2,6 % des dépenses militaires mondiales. Quels sont les moteurs de cette hausse ? Cette augmentation traduit-elle une tendance de long terme ?

De manière générale, on identifie trois principaux moteurs d’augmentation des dépenses militaires d’un pays : 1) la perception d’une menace et/ou un engagement dans un conflit armé ; 2) la mise en œuvre de grands programmes de modernisation d’armements majeurs (production/achat d’avions de combats, de navires, etc.) et 3) les relations avec les alliés et partenaires militaires, via notamment l’aide militaire, une présence des forces armées à l’étranger ou des exercices conjoints, par exemple. Les deux premiers facteurs sont définitivement les plus importants.

Graphique 1. Évolution des dépenses militaires mondiales en milliards USD constants de 2017, 1998-2018

* Le SIPRI ne fournit pas d’estimation pour 1991 faute de données fiables dans le contexte de l’effondrement de l’Union soviétique

Source : SIPRI, 2019

L’environnement sécuritaire international est parcouru de tensions politico-militaires sévères (Inde-Pakistan, Chine-États-Unis-Russie, Corée du Nord-États-Unis et Iran-États-Unis, Iran-Arabie saoudite, en mer de Chine méridionale, Russie-Ukraine à propos de la Crimée…), de conflits internes ou territoriaux dans plusieurs pays (Égypte, Syrie, Libye, Darfour…) et de guerres au Moyen-Orient, notamment au Yémen. Une partie de la hausse des dépenses militaires est directement attribuable aux coûts des guerres via l’achat d’armes et de munitions (notamment, des missiles et des munitions conventionnelles en grandes quantités). Pour le moment, il ne semble pas y avoir de solides solutions diplomatiques visant à mettre un terme aux conflits. En fait, on observe plutôt un manque de volonté de la part de plusieurs de pays engagés dans ces conflits, notamment l’Inde et le Pakistan, deux puissances nucléaires, à travailler à une résolution diplomatique.

De surcroît, plusieurs États producteurs continuent de transférer des armements à l’Arabie saoudite. On pense ici aux trois principaux fournisseurs : les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, en ordre d’importance. Ces pays sont aussi présents en Arabie saoudite, notamment en soutien des forces armées saoudiennes. La France et le Royaume-Uni ayant ratifié le Traité sur le commerce des armes, on peut s’interroger sur leur engagement envers cette institution. De leur côté, les États-Unis ont signé, mais ont annoncé qu’ils ne le ratifieraient pas. Ces interprétations laxistes sont préoccupantes, si l’on considère la crise humanitaire profonde créée de toute pièce au Yémen.

La tendance haussière des dépenses militaires mondiales est significative et devrait être matière à inquiétude pour les dirigeants et pour les citoyens. Beaucoup d’analyses publiées présentent les hausses de dépenses militaires comme un signe de durcissement des relations politico-stratégiques. Certains discours présentent une variation positive du niveau des dépenses militaires des autres pays comme des indicateurs de menaces. En fait, les évolutions des dépenses militaires traduisent des effets de cycles et des objectifs multiples qui sont poursuivis simultanément. Elles ne doivent pas être réduites à l’achat d’armements en vue de se préparer à un conflit armé, comme le laissent entendre actuellement plusieurs propos largement repris dans les médias et au sein des institutions politiques nationales et internationales.

Que doit-on penser du concept de « course aux armements » qui est parfois utilisé pour décrire la situation actuelle ?

Le concept de course aux armements n’est pas adapté au contexte contemporain. C’est un terme daté qui est problématique pour décrire et comprendre les relations militaro-sécuritaires à l’échelon international. La formule implique une simplification importante des dynamiques militaires et sécuritaires actuelles en mettant au centre de l’analyse l’accumulation compétitive d’armes entre deux ou plusieurs grandes puissances qu’on présente d’abord comme étant en concurrence en faisant peu de cas des interdépendances.

De plus, les chiffres des dépenses militaires questionnent la pertinence de la notion de course aux armements pour caractériser la période actuelle. Avec 649 milliards USD (en valeur constante de 2017) les dépenses militaires de Washington affichent une différence de 399 milliards USD avec le second pays le plus dépensier, la Chine qui dépense 250 milliards USD. L’écart entre les États-Unis et le troisième pays le plus dépensier en matière militaire, l’Arabie saoudite, atteint 581 milliards USD. Compte tenu des gouffres de dépenses militaires entre ces trois pays, on peut se demander qui est en course avec qui au juste.

Plutôt que d’opter pour une forme de prêt-à-penser tordant la réalité, il est plus intéressant d’identifier et d’analyser de manière rigoureuse et critique la diversité des moteurs soutenant les hausses de dépenses militaires, leurs fondements et les contextes variés qui les conditionnent. Dans le cas des États-Unis, les premières causes des hausses observées du budget militaire américain sont d’abord le colossal programme de modernisation des capacités militaires visant à faire passer les armes du Pentagone à la prochaine génération plus avancée technologiquement. Afin de brouiller les cartes, le projet de modernisation américain est enrobé d’un discours trompeur de « retour de la compétition entre grandes puissances » qui implique également la dimension nucléaire militaire. Cela dit, il ne faut pas sous-estimer les coûts impliqués par la participation directe du pays à plusieurs conflits armés.

La Chine incarnerait l’un des pays avec lesquels les États-Unis seraient en « compétition ». Depuis que le SIPRI a développé la méthodologie pour recenser les dépenses militaires chinoises, on constate que la part des dépenses militaires sur le PIB chinois ne va jamais au-delà de 2 %. Cela dit, la croissance chinoise pour la période 1989-2018 est spectaculaire[1]. L’augmentation des dépenses militaires observée depuis 1989 est donc elle aussi vigoureuse. Elle continue de soutenir a) la modernisation de la base industrielle de défense chinoise ; b) un rattrapage des technologies militaires plus avancées pour les armements et, en conséquence, c) la capacité de développer des systèmes d’armes majeurs (avions de combat, sous-marins, etc.) sans le soutien du partenaire russe, dans le cadre d’une politique visant à limiter la dépendance à des fournisseurs étrangers pour les armements, une posture que plusieurs grands pays producteurs d’armements (États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie…) maintiennent depuis la Guerre froide.

Pendant longtemps la hiérarchie des États les plus dépensiers en matière militaire n’a que peu évolué. Pourtant, cette année, on note plusieurs changements ou des confirmations de tendances. Quelles sont les évolutions les plus marquantes ?

Ces observations soulèvent plusieurs interrogations sur la « nouvelle compétition entre grandes puissances », un discours qui ramène à la période définitivement révolue de la Guerre froide. Le monde a changé depuis 1991. Les tensions internationales contemporaines sont peut-être sévères, mais on est loin des dynamiques de l’affrontement bipolaire. Les analyses et les solutions doivent évoluer, chercher à rendre compte de la complexité des contextes contemporains plutôt que de tordre la réalité pour la faire cadrer à des outils conceptuels datés et inadaptés.

Tableau 1. Les 15 États aux dépenses militaires les plus élevées en 2018

Source : SIPRI, 2019

En général, le sommet de la hiérarchie des États les plus dépensiers évolue lentement. Par contre, sur le temps long, des évolutions sont notables. Par exemple, en 1989 le sommet de cette hiérarchie était composé par les États-Unis (601 milliards USD en valeur constante de 2017), l’Union soviétique (268 milliards USD), l’Allemagne de l’Ouest (60 milliards USD), la France (59,8 milliards USD), le Royaume-Uni (51,2 milliards USD) et le Japon (39 milliards UDS). Le top 5 pour 2018 est quelque peu différent : les États-Unis sont au premier rang (633, 5 milliards USD, toujours en valeur constante de 2017), mais les pays suivants sont la Chine (239,2 milliards USD), l’Arabie saoudite (65,8 milliards USD), l’Inde (66,6 milliards USD) et la Russie (64, 2 milliards USD). La France suit à la sixième position avec un niveau des dépenses proche de celui de 1989 (59, 5 milliards USD).

Vraisemblablement, la Russie connaîtra à nouveau une hausse de ses dépenses militaires au cours des prochaines années, à moins de problèmes majeurs de revenus, comme une crise des cours du pétrole et/ou du gaz, mais il est délicat à ce stade de se prononcer sur son ampleur. Le déclin des dépenses militaires russes est ainsi probablement temporaire. Le pays est entre deux programmes majeurs de modernisation de ses armements et de ses capacités de production et il faut anticiper que les dépenses augmentent sous l’effet de la mise en œuvre du nouveau programme planifié depuis quelques années déjà. Le recul de la Russie dans le classement est aussi relativement accentué par la croissance des dépenses militaires françaises de 2013 à 2017. En France, l’actuelle ministre des Armées s’est engagée à atteindre l’objectif de dédier 2 % de la richesse nationale du pays aux dépenses militaires. Pour le SIPRI, la ponction sur la richesse nationale est déjà au-delà de cet objectif à 2,3 %. En effet, la définition des dépenses militaires du SIPRI inclut les ressources allouées à la Gendarmerie nationale. Celle-ci reste une force militaire même si elle est placée depuis quelques années sous l’autorité du ministère de l’Intérieur. Des gendarmes sont actuellement déployés sur le territoire national, mais aussi dans plusieurs théâtres d’opérations à l’étranger.

Enfin, les pays du reste du top 15 sont tous à peu près les mêmes pour les cinq à dix années passées. De manière générale, les pays affichant des dépenses militaires plus modestes tendent à bouger davantage dans le classement. Par exemple, une hypothétique diminution de 10 % des dépenses militaires chinoises maintiendrait la Chine au second rang des pays les plus dépensiers ; une diminution de 6 % des dépenses militaires japonaises entre 2017 et 2018 déclasserait le pays du 8e au 9e rang.

Il ressort des données du SIPRI qu’un monde post-américain n’est peut-être pas pour tout de suite. Quelle est la place des dépenses militaires dans la stratégie hégémonique américaine ?

En effet, l’éventualité d’un monde post-américain est très distante, notamment lorsqu’il est question des dépenses et des capacités militaires du pays. Les États-Unis dominent, de loin, le classement des pays les plus dépensiers en termes militaires. Le pays a une vision, une approche et une stratégie globales reflétant son poids politique et économique, ainsi que l’étendue de son influence. Celle-ci est entre autres incarnée par un vaste et dense réseau d’alliances, de partenariats et d’ententes de coopération militaire parcourant le globe.

Il est clair que les États-Unis maintiennent en partie leur hégémonie grâce à l’importance des ressources financières que le pays est prêt à consacrer à sa défense. Le procédé permet d’affermir son influence et de maintenir les garanties de sécurité qui accompagnent leurs engagements auprès des alliés (l’OTAN étant un exemple) et autres partenaires (Japon, Australie, Corée du Sud…). La portée et les ambitions globales des États-Unis ont toutefois un coût : la ponction sur la richesse nationale (en points de PIB) est de 3,4 % selon les données du SIPRI. Compte tenu du programme colossal de modernisation des armements américains, les dépenses militaires du pays vont probablement continuer de croître, à moins d’une crise économique majeure.

Graphique 2. Parts en pourcentages des 15 États aux dépenses militaires les plus élevées dans le total mondial des dépenses militaires en 2018

Source : SIPRI, 2019

Que dire de la Chine qu’on présente volontiers comme le challenger des États-Unis ?

Pour la période pour laquelle nous disposons de données, l’augmentation significative de la richesse chinoise s’est accompagnée d’une croissance des dépenses militaires du pays. Ces dépenses captent toujours un peu moins de 2 % du PIB chaque année. Cela mène le pays plus près de ses objectifs en termes de défense, c’est-à-dire d’être autosuffisant en production d’armement, d’avoir un rayon d’action militaire plus étendu dans la vaste région Asie pour protéger ses intérêts nationaux, qui sont essentiellement centrés sur sa croissance économique.

Cela est clairement illustré par le projet de la nouvelle route de la soie (Belt and Road), qui vise à la fois à maintenir l’accès de Beijing aux sources d’approvisionnement en matières premières et à avoir des débouchés pour ses produits. Tout cela dans le but de continuer à soutenir la croissance économique d’un pays qui compte près de 1,4 milliard d’habitants.

Considérer la Chine comme un concurrent des États-Unis sur la base de la croissance de ses dépenses militaires est réducteur. Les autorités chinoises ont mis en œuvre une stratégie similaire à celles menées par les grandes puissances militaires dans l’après-guerre mondiale. Beijing a professionnalisé ses forces armées, mis en place un plan d’industrialisation militaire de long terme visant à réduire sa dépendance vis-à-vis de sources extérieures d’approvisionnement, rationalisé les structures administratives… La Chine n’a pas fait de mystère de son intention de devenir une puissance militaire davantage en adéquation avec sa puissance économique.

Cela semble actuellement poser des problèmes au club sélect des grandes puissances établies. Ces dernières sont méfiantes face aux nouvelles capacités d’un État dont les décisions sont susceptibles dans le futur de restreindre leur capacité à investir des théâtres militaires en Asie centrale, au Moyen-Orient ou encore en Afrique. On doit cependant relever qu’en dépit d’une affirmation ferme dans son cadre régional, la posture militaire de Beijin n’a pas de commune mesure avec l’aventurisme militaire des Américains et de certaines puissances européennes depuis la fin de la Guerre froide.

Avec le déclassement de la Russie qui se poursuit et qui se traduit par deux rangs de perdus au profit de l’Arabie saoudite et de l’Inde, peut-on dire que la nouvelle Guerre froide a vécu ?

Déjà, le concept de « nouvelle Guerre froide » est particulièrement problématique, tout comme celui déjà évoqué de « courses aux armements » qui est aussi parfois une autre manière de parler d’une nouvelle Guerre froide. On devrait éviter d’appliquer ces formulations toutes faites qui ne disent en fait pas grand-chose de la situation, mais qui sont appliquées comme des bumpers stickers rhétoriques dès que des tensions politico-stratégiques entre puissances s’intensifient.

Ces formulations vagues colportent de manière plus ou moins insidieuses des prescriptions de politiques comme la nécessité de produire de nouveaux armements, de marginaliser le dialogue diplomatique, d’ignorer les traités et les institutions ou encore les embargos. La caricature rejoint parfois la désinformation et en fait une forme de propagande aux prescriptions intéressées ; c’est-à-dire en orientant prioritairement les ressources vers les acteurs du domaine militaire. Les auteurs de « fausses nouvelles » ont des visages très divers.

Cela dit, les tensions politico-stratégiques entre grands pays dépensiers, dont plusieurs ont des capacités nucléaires militaires, sont un véritable souci pour la sécurité internationale. C’est d’autant plus le cas que les initiatives visant à désamorcer ces tensions sont peu nombreuses et qu’elles ne semblent pas donner de résultats positifs. On assiste à la généralisation d’une rhétorique martiale insistant sur les différends et sur les tensions, d’autant plus dangereuse que l’innovation diplomatique fait défaut.

Bien qu’en guerre au Yémen et au cœur de tensions régionales (avec l’Iran, la Syrie et le Qatar, par exemple), l’Arabie saoudite voit ses dépenses militaires diminuer de 6,5 % ? Quels sont les facteurs expliquant tant cette baisse que la position finalement solide du pays au troisième rang des États les plus dépensiers dans le domaine militaire ?

En fait, nous n’avons pas d’explications claires pour la baisse des dépenses militaires saoudiennes, car les données ne sont pas fiables. Le pays, déjà très peu transparent, ne fournit pas de détails sur ses chiffres. La trajectoire récente est aussi quelque peu erratique. Les dépenses militaires de Riyad ont crû significativement de 2002 à 2015 (+129,2 %) et ont chuté respectivement de 39 % en 2016 et de 6,5 % en 2018, avec une hausse de 11,5 % en 2017. L’explication de la chute de 39 % en 2015 est assez claire ; il s’agit de l’impact de la chute des prix du pétrole de 2014, qui a réduit les ressources financières du Royaume.

En revanche, la chute de 6,5 % en 2018 est déroutante. Le pays est en guerre au Yémen, il importe des quantités significatives d’armements majeurs et sophistiqués ainsi que beaucoup de munitions pour mener ses opérations dans lesquelles plusieurs forces armées des pays occidentaux, dont la France, sont parties prenantes. Compte tenu du manque de transparence, il n’est pas possible à ce stade de savoir avec un minimum de certitude les raisons de cette décroissance.

Faute de données fiables pour un trop grand nombre d’États, cela fait plusieurs années que le SIPRI ne donne plus de tendance régionale pour le Moyen-Orient. Quelle analyse faites-vous des données encore disponibles pour les États de la région ?

Cela fait quelques années en effet que nous ne présentons pas une estimation des dépenses militaires au niveau régional pour le Moyen-Orient. Plusieurs pays, dont certains poids lourds comme les Émirats arabes unis (ÉAU), ont cessé de publier leurs budgets de défense. De plus, des États de la région sont en guerre, ce qui a tendance à avoir des impacts sur la fiabilité des chiffres présentés. Dans ce contexte, toute tentative d’estimer les dépenses au niveau régional est pratiquement vouée à l’échec.

Comme pour les autres régions, il y a des variations majeures dans la manière de rapporter les dépenses militaires et dans la transparence des pays du Moyen-Orient. Or, le Moyen-Orient est la région la plus problématique en termes de transparence. Par exemple, le Qatar ne publie plus ses dépenses militaires depuis 2011. Les ÉAU ont cessé de rapporter leurs dépenses militaires en 2014 alors que l’Arabie saoudite présente ses budgets militaires, mais ne donne qu’un seul chiffre, sans aucun élément de contexte et sans explications des hausses ou des baisses. Les données pour l’Irak sont aussi sujettes à caution tout comme celles d’Oman depuis 2016. Celles du Yémen sont inexistantes depuis 2015 à cause du conflit qui ravage le pays. En contraste, l’Iran présente ses budgets et dépenses militaires de manière détaillée, tout comme Israël, la Turquie, le Liban, l’Égypte et la Jordanie. De manière générale, on peut dire que la transparence est fortement contrastée dans la région. C’est aussi le cas dans d’autres régions, mais pas au point d’interdire des estimations un tant soit peu crédibles.

Graphique 3. Évolution des dépenses militaires par régions en pourcentages, 2017-2018

Source : SIPRI, 2019

En restant sur le registre des données régionales, on note que la tendance en Afrique en 2018 est à une baisse de 8 % ? Considérant les troubles que connaissent plusieurs pays de la région comment expliquer ce résultat ?

Quand on parle de dépenses militaires africaines, il faut prendre en compte certains paramètres clés pour bien interpréter les chiffres. D’abord, l’Afrique est la région affichant collectivement les dépenses militaires les plus modestes avec 2,2 % du total mondial. Les pays d’Afrique subsaharienne sont ceux qui dépensent le moins de toutes les régions. Les pays d’Afrique du Nord incarnent ainsi la majeure partie des dépenses militaires du continent avec 22,2 milliards USD pour quatre pays (Algérie, Libye, Maroc, Tunisie) et 18,4 milliards USD pour la totalité des pays d’Afrique subsaharienne, soit 46 pays. L’Algérie, avec des dépenses de 9,6 milliards USD, domine la région.

Tableau 2. Les dépenses militaires en Afrique

(*) = estimation

a À l’exclusion de l’Érythrée et du Soudan

Source : SIPRI, 2019

Ensuite, des augmentations ou des diminutions majeures des dépenses militaires dans une poignée de pays peuvent avoir des impacts significatifs au niveau continental. Par exemple, la baisse de 8 % observée pour l’ensemble de la région en 2018 est en fait essentiellement attribuable à l’Angola (-18 %) et au Soudan (-49 %). Dans le cas de l’Angola, la chute du prix du pétrole de 2014 a créé une crise économique sévère dont le pays ne s’est pas encore remis malgré l’assistance du Fonds monétaire international (FMI) sous la forme d’un prêt de 3,7 milliards USD. Le Soudan, quant à lui, conjugue une crise économique majeure, un engagement dans un conflit armé actif dans le Darfour et des manifestations violentes à l’interne contre le président Omar al-Bashir. Si l’on regarde les dépenses militaires du pays au cours des dernières années, on remarque qu’elles varient significativement. Aucune issue aux problèmes économiques sévères de ces deux pays ne semble en vue.

Outre le cas particulier des États-Unis, que faut-il retenir de la situation dans les Amériques ?

Si l’on exclut le nord des Amériques, l’Amérique du Sud se place en bonne deuxième position au niveau continental. L’Amérique centrale représente quant à elle une part très faible des dépenses militaires, avec 1,2 % du total pour les Amériques. D’ailleurs, quelques pays de cette région n’ont pas de budget de défense, comme le Panama.

Tableau 3. Les dépenses militaires dans les Amériques

a Variation en termes réels ; b À l’exclusion de Cuba

Source : SIPRI, 2019

En Amérique du Sud, les pays les plus dépensiers sont, par ordre d’importance, le Brésil, qui représente 50 % des dépenses militaires de la sous-région, suivi de la Colombie (19 %), du Chili (10 %) et de l’Argentine (7,5 %). Le Brésil poursuit, depuis le milieu de la décennie 2000 l’objectif de monter en gamme en termes de capacités militaires, dont l’une des finalités est de produire ses propres armements. En général, ces projets d’industrialisation militaire sont coûteux et les résultats peuvent être décevants. Cela dit, la compagnie d’aviation Embraer a connu du succès avec les avions Super Tucanos. Reste à voir si les autres segments de production (comme le transporteur tactique KC-390, par exemple) connaîtront le même destin.

En 2018, les dépenses militaires brésiliennes ont continué de croître de 5,1 % malgré une situation économique difficile, une crise politique majeure, la réduction des services publics et de nombreuses manifestations. Dans la région, il faut aussi souligner le cas du Venezuela pour lequel le SIPRI ne propose pas d’estimation des dépenses militaires. Le pays est encore aux prises avec une crise politico-économique majeure. La valeur du Bolivar continue de fluctuer significativement et l’inflation semble hors de contrôle avec des hausses de 1 000 %. La Colombie, quant à elle, est toujours aux prises avec une situation sécuritaire difficile. Les cartels y sont toujours présents, les droits humains ouvertement bafoués et les multiples groupes de guérilleros encore actifs. Le Chili continue de faire croître ses dépenses militaires notamment du fait de tensions pérennes sur les frontières avec le Pérou et la Bolivie. Enfin, l’Argentine connaît des problèmes sérieux de maintien en condition de ses appareils. Selon plusieurs sources, l’état des équipements argentins serait tellement mauvais que la plupart des plateformes seraient inutilisables[2].

L’Asie continue de connaître une croissance des dépenses supérieure à celle constatée mondialement ? Quels sont les États qui tirent ces résultats vers le haut et quelles sont les logiques soutenant cette hausse constante depuis 1988 ?

Tableau 4. Les dépenses militaires en Asie et en Océanie

a Variation en termes réels ; b À l’exclusion de la Corée du Nord, du Turkménistan et de l’Ouzbékistan ; c À l’exclusion du Turkménistan et de l’Ouzbékistan ;d À l’exclusion de la Corée du Nord

Source : SIPRI, 2019

L’Asie, qui comprend l’Asie centrale (Inde, Pakistan, Sri Lanka, etc.), l’Asie du Sud et l’Asie Pacifique, inclut plusieurs pays parmi les plus dépensiers au niveau mondial. On pense notamment à la Chine, au Japon, à l’Inde et à la Corée du Sud, qui sont tous dans le top 10 des pays consacrant le plus de ressources à leur défense. De plus, certains pays aux dépenses militaires plus modestes ont fait croître les ressources allouées à leur défense de manière significative. Par exemple, le Cambodge a augmenté ses dépenses militaires de 191 % entre 2009 et 2018. Une croissance économique d’approximativement 6 % sur dix ans a mené à des dépenses militaires plus élevées[3]. Ces revenus auraient en grande partie soutenu l’augmentation des soldes des militaires, ainsi que l’importation de camions militaires et de véhicules d’ingénierie. La Mongolie a fait croître ses dépenses militaires de 115 % sur les dix dernières années. Selon le magazine The Diplomat[4], ce pays cherche à maintenir son autonomie face à ses puissants voisins, la Chine et la Russie. Enfin, notons l’augmentation de 102 % des dépenses militaires du Bangladesh, sur la même période. Cette hausse est en grande partie attribuable à un programme de modernisation des armements du pays lancé en 2009. Dacca a ainsi importé des équipements chinois (tanks), des systèmes d’artillerie sol-air, des avions légers Yak de la Russie ou encore des missiles russes (R-77 BVR)[5]. Cela dit, il faut garder en tête que l’information relatives aux dépenses et aux achats d’armements de ces pays est parfois problématique, et la transparence, douteuse.

L’Inde a augmenté ses dépenses militaires pendant cinq années consécutives (2014-2018). Cette tendance est attribuable à la volonté de développer des capacités nationales de production d’armements, mais aussi aux regains des tensions avec le Pakistan et au Cachemire. On doit rappeler ici que l’Inde comme le Pakistan disposent de l’arme nucléaire. Les relations politiques et économiques dans les sous-régions qui composent l’Asie sont parcourues de tensions politico-stratégiques majeures. La Chine, en particulier, est l’objet de méfiance importante de la part de pays de mer de Chine méridionale (si l’on accepte cette dénomination). Il s’agit de loin du pays le plus dépensier en Asie. On note que les tensions entre Beijing et Taipei ont repris de plus belle en 2019. Taiwan est soutenu diplomatiquement et militairement par les États-Unis via des transferts d’armes et des exercices dans la région. Cela dit, la Chine n’alloue pas plus de 2 % de son PIB à ses dépenses militaires, malgré la dégradation de l’environnement sécuritaire sous régional. On l’a déjà mentionné, mais le projet de « Nouvelle route de la soie » est également un facteur de frictions et nourrit un processus de militarisation dans plusieurs États. Les rivalités qui réémergent dans le cadre de ce projet colossal doivent être suivies de près afin d’éviter un durcissement des tensions, voire des conflits ouverts.

L’Océanie, que les données du SIPRI traitent conjointement avec l’Asie, connaît cependant une baisse substantielle des dépenses militaires. Comment expliquer ce résultat ?

Contrairement à l’Asie, en 2018, l’Océanie a vu ses dépenses militaires diminuer de 2,9 % par rapport à 2017. Cette diminution est entièrement due à l’Australie, le poids lourd économique et militaire d’une sous-région qui ne comprend que l’Australie, les Fidji, la Nouvelle-Zélande, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et quelques micro-États qui n’ont pas de dépenses militaires. D’ailleurs, la part de l’Australie dans le total des dépenses militaires de l’Océanie est de 91,7 %. La décroissance régionale est donc aussi imputable à la décroissance de 3,1 % des dépenses militaires australiennes en 2018 exprimées en dollars constants de 2017.

Cela dit, les dépenses militaires de Canberra avaient augmenté de 17 % de 2014 à 2017. La principale raison de cette hausse est la mise en œuvre d’un vaste projet de modernisation des équipements militaires et le développement de capacités nationales de production d’armements à travers les importations d’armes. Le pays cible les groupes d’armements majeurs d’Europe et des États-Unis (qui sont par ailleurs pour certains déjà implantés en Australie depuis un bon moment). Il fait de l’intégration des petites et moyennes entreprises du pays dans les chaînes d’approvisionnement une condition d’accès aux nouveaux programmes d’armements australiens. Après quatre années de hausses relativement importantes, 2018 affiche donc un ralentissement sans doute temporaire, qui s’explique par des délais dans l’octroi des contrats et des paiements alors que les premiers programmes démarrés en 2014 suivent leur cours.

En Europe aussi le portait semble contrasté…

Tableau 5. Les dépenses militaires en Europe

Source : SIPRI, 2019

On observe une hausse des dépenses militaires en Europe centrale et occidentale. Pour la plupart des pays d’Europe centrale, les augmentations de dépenses militaires sont motivées par une perception élevée de la menace russe. La Pologne, par exemple, le plus important pays dépensier de la sous-région Europe centrale, est le pays qui a procédé à la plus forte augmentation de ses dépenses militaires, avec une hausse de 8,1 % en 2018, et de 48 % pour la période 2009-2018. Cela dit, d’autres pays invoquant également la menace russe ont significativement haussé leurs dépenses militaires sur la même décennie, notamment la Lituanie (+156 %), même si ici, attendu la modestie du volume en termes réels (de 375 millions USD en 2014 à 956 millions USD, en valeur constante de 2017) les variations annuelles sont à manier avec précaution.

Collectivement, les pays d’Europe occidentale dominent le portrait et comptent pour 73 % des dépenses militaires de la région. En 2018, les cinq pays qui dépensent le plus pour leur défense sont par ordre décroissant d’importance : 1) la France, 2) le Royaume-Uni, 3) l’Allemagne, 4) l’Italie et 5) l’Espagne. La France et le Royaume-Uni ont tous les deux mis en œuvre des programmes de modernisation, y compris de leurs équipements de dissuasion nucléaire. En 2016, les autorités allemandes ont annoncé leur volonté de mettre à jour leurs flottes d’équipements, notamment via l’achat de 33 Eurofighters ainsi que d’avions de ravitaillement MRTT. Berlin s’est aussi engagée à augmenter les dépenses militaires du pays à 1,5 % du considérable PIB allemand en 2024, mais de plus en plus de doutes sont émis quant à la concrétisation de cet engagement.

Graphique 4. Évolutions des dépenses militaires de l’Allemagne de l’Espagne, de la France, de l’Italie et du Royaume-Uni en millions USD constants de 2017, 2001-2018

Source : SIPRI, 2019

En 2018, les dépenses militaires françaises décroissent modestement de 1,4 % après une croissance de 11,1 % de 2013 à 2017. Cette hausse est essentiellement attribuable aux ressources injectées dans les divers conflits auxquels le pays participe, ainsi que pour démarrer des projets de modernisation des armements. On doit aussi relever qu’une part significative des coûts des opérations militaires françaises a en fait été défrayée via le principe de solidarité interministérielle, un mécanisme où les ministères sont appelés à octroyer une part de leurs ressources budgétaires pour gérer une situation d’urgence. Pendant plusieurs années, ce mécanisme a contribué à hauteur de 65 % des surcoûts des opérations militaires françaises, alors que le ministère de la Défense du pays payait les 35 % restants. En 2018, le président Macron a mis un terme à cette situation, forçant le ministère de la Défense à puiser dans son propre budget pour les coûts supplémentaires des opérations extérieures, ce qui mène à la décroissance observée pour 2018.

La situation générale en termes de dépenses militaires reste incertaine au Royaume-Uni. Le contexte économique est morose, les incertitudes sur l’avenir du pays perdurent du fait du Brexit et cela affecte également la défense. Des projets majeurs de modernisation, notamment des capacités nucléaires du pays, sont planifiés, mais les doutes sur la capacité à les financer demeurent. Les dépenses militaires britanniques ont crû de 1 % en 2018, mais elles ont diminué de 17 % sur la période 2009-2018. Il est difficile d’anticiper la façon dont le dossier du Brexit évoluera à court terme et quels en seront les impacts sur la défense.

À Washington et à Bruxelles, que ce soit au sein de l’Union européenne ou de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), un discours prétendant que les Européens dépensent trop peu pour leur défense est en vogue depuis longtemps. Est-il justifié ?

L’Europe, qui pour le SIPRI comprend la Russie et les pays d’Europe orientale, est la troisième région en importance derrière les Amériques – où les États-Unis se trouvent loin devant –, et l’Asie, qui couvre près de la moitié des pays du monde et qui comprend plusieurs États aux dépenses militaires élevées, dont la Chine et l’Inde. En termes sous régionaux en revanche, l’Europe occidentale[6] est la seconde plus importante sous-région en termes de dépenses militaires, avec 266 milliards USD, derrière l’Amérique du Nord avec 670 milliards USD. Lorsque l’Europe occidentale est isolée du reste de la région Europe, on voit clairement que les niveaux des ressources alloués à la défense sont significatifs. C’est encore plus le cas lorsqu’on considère les États membres de l’Union européenne, qui dépensent 281 milliards USD, soit un montant correspondant à 1,5 % du PIB (graphique 5). Cela met en cause l’idée selon laquelle les pays européens ne dépensent pas suffisamment pour leur défense et doivent impérativement y consacrer 2 % de leur PIB. D’ailleurs, les raisons soutenant cette idée ne sont pas du tout claires et devraient être davantage publiquement questionnées. On espère que les décisions prises en matière d’allocations à la défense sont avant tout basées sur des priorités et des objectifs liés à la sécurité nationale et pas sur la richesse produite annuellement.

De plus, le PIB étant un indicateur pouvant varier de manière significative d’une année sur l’autre, on peut s’interroger sur la pertinence d’un objectif formulé en pourcentage de PIB. Qu’arriverait-il si une récession survenait ? Est-ce que les dépenses militaires diminueraient de manière concomitante ? Le discours du 2 % est essentiellement un écran de fumée discursif qui sert à occulter des dimensions politiques, économiques et financières plus fondamentales tout en participant d’un discours militarisant particulièrement dérangeant.

Quelle est la menace ? Quels sont les moyens à déployer ? Quels sont les engagements pris par les ministères de la Défense ? Quelles sont les implications financières ? Quelles autres missions publiques devraient être écartées au profit de la défense ? Poser ces questions et dresser des liens entre elles, c’est ouvrir la voie à un débat citoyen et contradictoire ce qui n’est pas toujours une option promue par les acteurs du champ de la défense, loin de là.

Graphique 5. Les dépenses militaires en millions USD des pays membres
de l’Union européenne, de la Russie et de la Chine en 2018

Source : GRIP, d’après SIPRI et FMI, 2019

À l’occasion de la publication des données de cette année, le SIPRI a décidé d’insister sur le fardeau militaire exprimé en pourcentage de PIB ? On vous a pourtant vus, comme d’autres, critiquer l’usage qui est parfois fait des dépenses militaires présentées en point de PIB. Pouvez-vous rappeler l’utilité de cette mesure et ses limites ?

Chaque année, le SIPRI met en lumière un thème plus spécifique pour ses données sur les dépenses militaires. Pour 2018, c’est le fardeau que représentent les dépenses militaires sur la richesse nationale. Cet indicateur est intéressant pour plusieurs raisons. D’abord, il chiffre la ponction — souvent appelé le fardeau — exercée sur la richesse collective des pays. On constate en effet que ce sont les pays du Moyen-Orient qui affichent les parts les plus élevées de dépenses militaires en pourcentage, et de loin. On peut mentionner ceux de l’Arabie saoudite avec 5,1 % de PIB ou Oman avec 8,2 %, le Koweït (5,1 % du PIB) ou encore le Liban (5 % du PIB). Tous ces pays sont engagés dans des conflits armés. Ces niveaux de parts de PIB seraient considérés comme insoutenables dans la plupart des autres régions et pays, et reflètent en fait le système social et politique de ces États, où la richesse est redistribuée à un petit nombre de citoyens, et laisse une grande partie de la population non nationale dans une situation de pauvreté.

Les conflits armés dans cette région — et ailleurs — sont aussi des facteurs d’accroissement de la part des dépenses militaires dans le PIB. De manière générale, ce sont les populations civiles qui subissent à la fois ces conflits et leurs conséquences. Le Yémen est un exemple de cette situation. On y trouve une triple crise (économique, humanitaire et sanitaire) qui aura vraisemblablement des impacts durables sur le pays et au-delà.

Aude-E. Fleurant, propos recueillis par Yannick Quéau

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Photographie : TSGT CECILIO RICARDO, USAF – Credit:36 COMMUNICATION SQUADRON – nationalinterest.org.

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Pour citer ce document

Aude-E. Fleurant : « Le concept de course aux armements n’est pas adapté au contexte contemporain », propos recueillis par Yannick Quéau, Décryptage d’OSINTPOL, 7 octobre 2019.

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Lire par ailleurs

Aude-E. Fleurant : « La Russie affiche une baisse significative de 20% de ses dépense militaire en 2017», propos recueillis par Yannick Quéau, Décryptage d’OSINTPOL, 4 mai 2018.

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Références

[1] 1989 est la première année pour laquelle le SIPRI présente une estimation des dépenses militaires chinoises. Voir la base de données du SIPRI sur les dépenses militaires.

[2] Allison, G. « Argentina has now ceased to be a capable military force », UK Defence Journal, 16 mai 2018.

[3] Gouvernement de l’Australie, Department of Defence, 2018. Defence economic trends in the Asia Pacific, décembre 2018.

[4] Negri, F-A., « Mongolia’s Military Marvel », The Diplomat, 13 juillet 2017.

[5] Mushtaq, S-B., « Bangladesh’s ambitious military modernization drive », The Diplomat, 9 Janvier 2018.

[6] La région Europe occidentale comprend dans les données du SIRPI les 20 pays suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie, Luxembourg, Malte, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède, Suisse. Les listes des pays et leur répartition dans les différentes régions sont consultables sur le site du SIPRI.