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Les impasses d’une construction européenne par la peur

L’émission de télévision Square salon du 10 décembre 2017 diffusée sur la chaîne Arte pose une question volontairement provocatrice : peut-on mourir pour l’Europe ? Dans un contexte politique, économique et social marqué depuis de nombreuses années à la fois par la défiance et le scepticisme des opinions publiques continentales face au projet de construction européenne et par la montée de populismes aux multiples visages, cette interrogation renvoie à la perspective du sacrifice de sa vie au nom d’un hypothétique idéal supranational partagé. La recherche de ce qui unirait un résident de Glasgow partisan de l’indépendance de l’Écosse et de son adhésion à l’Union, un travailleur détaché polonais officiant sur un chantier de construction au Portugal et soutenant les politiques identitaires et réactionnaires de Varsovie et un travailleur de la finance luxembourgeois expert en évitement fiscal et farouche défenseur du libre marché n’est pas une mince affaire.

La démarche ouvre une réflexion sur la notion de menace et sur les moyens dont les détenteurs d’une citoyenneté européenne — encore largement vide de contenu 25 ans après son introduction par le traité de Maastricht — sont prêts à se munir pour la contrer. La menace contemporaine la plus présente dans l’esprit des citoyens européens est certainement celle incarnée par les terroristes. Bien que ces derniers aient frappé et risquent encore de le faire un peu partout en Europe, les morts qu’ils causent, s’ils provoquent occasionnellement des élans de solidarité et de sympathie, ne suffisent pas à transcender les identités nationales ou même citadines. On est Madrid, Londres, Paris, Nice, Bruxelles, mais on n’est pas l’Union européenne, pas même lorsque c’est sa capitale qui est touchée. Sur un registre militaire plus classique, tout un discours sur la menace russe ne mobilise pas plus que cela les opinions publiques sauf dans les États ayant connu la domination de Moscou pendant la Guerre froide.

Pourtant, l’évolution des logiques sécuritaires et militaires en Europe conduit à dresser le constat suivant pour la construction européenne : à une doctrine économique libérale opposant sur un plan matériel les citoyens européens entre eux est venue se greffer avec de plus en plus d’insistance une idéologie sécuritariste et en fait militariste. Un ensemble libéral-militariste prospère ainsi actuellement au niveau européen sans garde-fou alors qu’il est porteur d’un populisme et d’un extrémisme condamnés à maintenir la construction européenne dans une impasse, faute de légitimé populaire et de réflexion plus large sur la notion de bien commun[1]. La peur est le terreau de ce libéral-militarisme préconisant le renoncement à des libertés fondamentales en même temps que des dépenses additionnelles dans les outils de la surveillance et de la violence politique armée. Si elle peut contribuer à une forme de transcendance, la peur exclut toute dimension positive, sauf à considérer le militarisme comme un vecteur de ré-enchantement de la construction européenne.

Les outils de la surveillance et de la violence étatique comme leviers de relance de la construction européenne ? Vraiment ?

Il faut être clair : l’option consistant à faire des enjeux sécuritaires et militaires un facteur de relance de la construction européenne est porteuse d’une dangerosité non négligeable dont on observe d’ailleurs déjà des manifestations[2]. La démarche se nourrit de la crainte de l’ennemi extérieur comme de celui de l’intérieur et suppose de faire des moyens de la surveillance et de la violence étatique un moteur du rapprochement entre États membres de l’Union. Il ne s’agit évidemment pas de nier l’utilité des fonctions de policier ou de soldat, mais bien de mettre en garde contre les dérives inhérentes au renforcement des moyens humains, matériels et budgétaires des acteurs publics et privés des domaines de la sécurité et de la défense.

Comme mentionné précédemment, l’ennemi de l’Europe est d’abord ce terroriste qui se cache dans la société. Au nom de sa traque, le droit à la vie privée n’est déjà plus garanti en Europe. Sous couvert de lutte contre le terrorisme, il s’efface devant l’impératif de surveillance d’un bien commun comme Internet ou le droit au fichage généralisé des individus sur la base de suspicions reposant parfois des éléments matériels particulièrement friables… quand ils existent[3]. Histoire de ne prendre aucun risque et de ratisser large, des États s’autorisent aussi a priori et en l’absence de tout consentement de la part des personnes concernées à collecter les métadonnées de tout à chacun et à les conserver au nom d’un avenir forcément incertain.

C’est une nouvelle réalité dans un continent où, même pendant les années de plombs, les régressions en matière de libertés individuelles et collectives n’avaient pas atteint ce niveau dans autant de pays d’Europe occidentale[4]. Les risques pour la criminalisation de la dissidence sont déjà largement documentés[5]. Pourtant, les mesures correctives en la matière se font attendre, la Cour européenne des droits de l’homme, déjà peu aisée à saisir, a de plus en plus de mal à faire entendre sa voix et à faire appliquer ses décisions par les États membres[6]. Ceux et celles qui avaient espéré voir dans l’Union européenne et/ou dans l’action de ses membres un moyen de préservation contre les éventuelles dérives des entreprises privées dans l’exploitation des données personnelles ont de quoi être déçus[7]. En dépit de tous les enseignements pouvant être tirés des dérives du Patriot Act américain adopté dans la foulée des attaques du 11 septembre 2001, certains membres de l’Union européenne ont suivi avec enthousiasme le modèle américain et entendent convertir les instances communautaires à leur conception de la lutte contre les mouvements terroristes[8].

L’ennemi est aussi ce russe, qu’il soit hacker ou conducteur d’un char qu’on présente volontiers comme étant prêt à déferler sur les pays baltes ou la Pologne. Le retour de la puissance russe dans les affaires stratégiques inquiète (pas à tort, d’ailleurs) si bien que les membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), particulièrement les États européens sont incités à revoir leurs dépenses militaires à la hausse. On postule, dans certains discours intéressés des lobbies administratifs et industriels, des années de laxisme face à une puissance russe (ré)émergente dont le potentiel et l’agressivité n’évoqueraient rien de moins que les plus belles heures de la Guerre froide[9].

Comme toute bonne entreprise de propagande, ce discours s’appuie pour partie sur des faits tangibles. Oui, la Russie a utilisé son appareil militaire pour redessiner ses frontières en Europe avec l’annexion de la Crimée. Oui, il y a suffisamment d’indications laissant penser que la Russie a tenté de s’ingérer dans les affaires internes de nombreux pays européens. Oui, le niveau des dépenses militaires russes a connu une hausse soutenue depuis 1998 pour dépasser désormais celui affiché par les principaux États européens du domaine (graphique 1). C’est indéniable.

On rappellera tout de même que les chiffres constatés sont, en ce qui concerne la Russie, loin d’évoquer les niveaux de l’Union soviétique pendant la Guerre froide. En 1988, Moscou affiche en effet un niveau de dépenses militaires de l’ordre de 250 milliards USD[10]. Quatre ans plus tard, en 1992, les dépenses de Fédération de Russie sont de 42 milliards USD et elles atteignent un plancher de 14 milliards USD en 1998. Le cycle actuel suivi par la Russie est donc parti d’un niveau particulièrement bas. Il vise d’ailleurs une sorte de rattrapage qualitatif au niveau des armements par rapport à ceux des forces de l’Alliance atlantique. Dès les années 1990, les pays occidentaux ont effet mis en œuvre d’importantes réformes visant à implanter dans leurs arsenaux toute une série de nouvelles technologies pour tenir compte des évolutions apportées par la révolution dans les affaires militaires (RAM) et des impératifs de la guerre réseau centré (Network Centric Warfare). La Russie ne pouvait pas suivre le mouvement pour cause de marasme économique[11].

Ces observations sur la Russie sont à mettre en parallèle avec les évolutions des dépenses militaires dans les 5 États européens les plus importants en la matière. Hormis, le cas de l’Allemagne, première puissance économique de l’Union européenne (et de loin), les niveaux des dépenses militaires de l’Espagne, de la France, de l’Italie et du Royaume-Uni se trouvent à des seuils finalement relativement proches des niveaux des dépenses militaires constatés immédiatement au sortir de la Guerre froide, ceci en dépit de la crise économique de 2008. La RAM, mais aussi les multiples opérations militaires qui ont vu des bombardements et des déploiements de troupes au sol ont contribué, depuis la seconde moitié des années 1990 (Kosovo) jusqu’aux nouveaux théâtres de la guerre globale au terrorisme (Global War on Terror — GWOT), à limiter la décroissance des dépenses militaires en Europe et même à les faire croître de manière significative dans certains cas (au Royaume-Uni, en Italie et en Pologne, notamment), au moins temporairement.

De plus, au cours des dernières années, la Russie a été le témoin de la modernisation et de l’intensification technologique des armements des membres d’une alliance vouée à la combattre. Elle a aussi vu les États-Unis et leurs alliés mener des guerres en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Syrie et opérer d’autres déploiements dans de nombreux pays africains. Elle a vu l’OTAN intégrer de nouveaux membres et venir border ses frontières jusqu’à faire des œillades à un pays du Caucase comme la Géorgie. La Russie n’a également pu que prendre acte de la dénonciation unilatérale du Traité ABM par les États-Unis, une décision qui ouvrait la voie au déploiement du bouclier antimissile américain en Europe. Moscou a, par ailleurs, été la spectatrice[12] des révélations d’Edward Snowden sur la surveillance généralisée d’Internet mise en place par les États-Unis avec la complicité contrainte des géants de la Silicon Valley. Les dignitaires russes ont pu s’amuser au passage des révélations sur l’espionnage entre alliés.

Un comportement n’en excuse pas l’autre, c’est entendu. Il faut néanmoins rappeler que la sécurité et en fait l’insécurité sont affaire de réciprocité. En effet, les renforcements des moyens militaires d’un acteur et l’usage qu’il fait de ces moyens sont en soit une source d’insécurité de ceux qui sont identifiés comme ses ennemis.

Combien de gens savent que les États membres de l’Union européenne affichent collectivement en 2016 un niveau de dépenses militaires (198,1 milliards USD) presque trois fois supérieur à celui de la Russie (environ 69,2 milliards USD) ? Et ces chiffres anticipent déjà sur le Brexit, car ils n’incluent pas les dépenses militaires du Royaume-Uni (graphique 2). En incluant les dépenses militaires britanniques (48 milliards USD), les dépenses militaires des États membres de l’Union européenne (246,3 milliards USD) dépassent de quelque 31 milliards USD celles de la Chine (215,2 milliards USD). On peut ajouter que pour atteindre le niveau actuel de ses dépenses militaires, la Russie doit consacrer une part de sa richesse nationale (5,4 % du PIB) 3,6 fois supérieure à celle consentie par les 28 États membres de l’Union européenne (1,5 % du PIB).

On peut bien sûr arguer que le morcellement des appareils de défense européens nuit à l’efficacité de l’ensemble. La dispersion budgétaire est une réalité, même si elle reste difficilement chiffrable. Toutefois, cela veut aussi dire qu’il se trouve en Europe des capacités excédentaires et que les États européens pourraient, en cas de meilleure coordination, soit dépenser moins pour leur défense, soit dépenser tout autant en accentuant donc encore un peu plus la dimension qualitative de leur appareil militaire face à une Russie qui est d’ores et déjà incapable de s’aligner sur les montants observés chez les États membres de l’UE, même au prix d’un effort atteignant une intensité difficilement soutenable dans la durée.

De plus, s’il est vrai que les logiques stratégiques dépendent pour partie des capacités militaires déployées dans une région précise, on ne peut pas pour autant faire abstraction du principal pilier de la défense du continent européen à savoir l’OTAN. Cette alliance militaire regroupe en son sein 22 des États membres de l’Union européenne auxquels il faut adjoindre, l’Albanie, le Canada, le Monténégro, la Norvège, la Turquie, l’Islande, mais aussi bien évidemment les États-Unis, c’est-à-dire le pays dépensant autant pour sa défense que les 7 États les plus dépensiers au monde après lui. Le concept de défense collective sur lequel repose l’OTAN est consacré par l’article 5 du traité qui dispose que :

« Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles, survenant en Europe ou en Amérique du Nord, sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence, elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique-Nord.[13] »

Cet engagement formel des parties signataires évite d’avoir à se poser la question de savoir si des Canadiens, des Français ou des Allemands sont prêts à mourir pour des Lettons ou des Roumains ou, pour reprendre la formule tristement célèbre du Premier ministre britannique Neville Chamberlain lors d’une allocution radiophonique en 1938, « pour des querelles dans des pays lointains entre des gens dont nous ne savons rien. »

L’analyse des rapports de force stratégiques en Europe implique nécessairement de prendre en compte l’entièreté des membres de l’Alliance. Dans ce contexte et attendu l’énormité du différentiel de puissance entre les seuls membres de l’Union européenne et une Russie dont l’outil de défense souffre par ailleurs du surdimensionnement de l’appareil de dissuasion nucléaire[14], comment peut-on donner le moindre crédit aux multiples analyses expliquant les dynamiques actuelles à l’aulne du concept de Nouvelle Guerre froide ?

La réponse est plus complexe qu’il n’y paraît, car elle invite à tenir compte des mobilisations symboliques opérées par les acteurs du champ de la défense, qui voient dans cette formule formatée pour les médias un formidable vecteur de promotion de leurs rôles et donc de leurs ressources. Il ne s’agit pas tant de rendre compte de quelque réalité tangible, mais de projeter une image simpliste, rapidement assimilable part tout un chacun pour imposer l’idée d’un monde où la menace est tout aussi dangereuse que du temps d’un affrontement bipolaire où le financement de la chose militaire allait (supposément) de soi.

Des dynamiques discursives orientées

L’objet de toute opération de propagande est de faire admettre que le danger et la propagande elle-même ne prennent leurs sources que chez l’ennemi. Ce dernier étant volontiers décrit comme vil et fourbe, il ne peut être digne de confiance. La prescription implicite et/ou explicite est donc de renforcer ses propres moyens militaires. À ce jeu de fabrique du consentement, les lobbies militaristes, qu’ils soient administratifs ou industriels, fournissent des efforts considérables[15] pour faire admettre la militarisation et la sécuritisation[16] comme étant des enjeux prioritaires dans tout projet politique.

On prend ici soin de distinguer le terme sécuritisation du terme sécurisation, qui sous-entend une meilleure protection. De même, la militarisation des enjeux ne renvoie pas à une meilleure défense, mais à l’élargissement des sphères d’intervention des acteurs du domaine et à l’augmentation de leurs moyens. On est en présence de processus dynamiques par lesquels des agents transforment un sujet en enjeu de sécurité et/ou de défense, ce qui justifie la mobilisation de ressources additionnelles pour contrer la menace. Dans un même mouvement, ces processus tentent de légitimer les mesures adoptées ou préconisées ainsi que les priorités et les hiérarchies de pouvoir ou de normes sociales[17]. On rejoint ici Jef Huysman pour qui « la sécurité est ce que les agents en font[18] » et que « dire ou écrire la sécurité n’est jamais un acte innocent ou neutre[19]. »

C’est par les discours sur la sécurité et la défense que les professionnels du domaine[20] orientent les compréhensions dans un sens favorable à leurs intérêts et/ou à ceux des groupes qui partagent leurs vues et profitent eux aussi, directement ou indirectement, des mesures ainsi instaurées. Il s’agit là d’une « fonction éminemment politique accomplie dans le cadre d’une lutte épistémique pour imposer des conceptions spécifiques du monde et le type de prescriptions politiques qui les accompagnent inévitablement[21]. »

Qu’il soit question d’occulter certains éléments ou d’en exagérer d’autres, ces manières de procéder concourent à faire en même temps de la Chine une menace pour l’hégémonie américaine, de la Russie un acteur revanchard prêt à déferler sur le Vieux continent et des membres de l’Union européenne des « bisounours » oisifs trop préoccupés par leur confort matériel pour accorder à la chose militaire les ressources qu’il conviendrait de lui allouer face à de tels dangers.

En éclipsant de la sorte toute nuance, c’est la vérité qu’on dissimule. Il convient manifestement de rappeler que ce n’est pas parce que ces observations s’appuient sur une part de réalité qu’elles forgent une analyse rigoureuse du contexte stratégique contemporain. Le discours du paragraphe précédent s’accommode mal de l’illustration offerte par le graphique 2 qui montre que les membres de l’Union dépensent ensemble davantage encore que la Chine. Par peur de mettre à mal l’image d’une Europe passive, ce récit caricatural évite aussi de dresser la liste des opérations militaires extérieures dans lesquelles sont impliqués les États membres de l’Union européenne depuis la fin de la Guerre froide. Claude Serfati avance le chiffre de 111 interventions au minimum pour la France seule entre 1991 et 2015 tout en précisant qu’on ne peut connaître le nombre exact, faute de décompte officiel et en fait de transparence en cette matière[22].

Cette dynamique en clair-obscur est particulièrement criante et en fait inquiétante en France où lobbies, experts sous perfusion financière du ministère de la Défense et des industriels du domaine et autres journalistes s’asseyant volontiers sur la déontologie professionnelle produisent tout un ensemble de discours orientés visant à faire admettre comme synonyme de l’intérêt national le renforcement des moyens militaires.

Les médias de l’hexagone jouent ici un rôle essentiel qui soulève quelques interrogations. Si les salles de rédaction du pays avaient d’un commun accord décidé de faire du conflit d’intérêts des experts de la défense un critère de crédibilité dans l’espace public, elles n’agiraient sans doute pas autrement qu’actuellement. Le journaliste, Jean-Dominique Merchet, déplore d’ailleurs le manque de perspective critique de ses confrères sur la chose militaire :

« Ce qui a disparu c’est le discours critique sur l’armée, les médias sont de plus en plus révérencieux vis-à-vis de l’institution militaire, à la limite de la complaisance : 95 % des sujets sur l’armée sont élogieux. Les politiques aussi en font trop, dès qu’un soldat français meurt on lui rend un hommage national. Dans un pays qui se prétend en guerre on doit, au contraire, être résilient. Et pourtant, Dieu sait que je ne suis pas antimilitariste…[23]»

La couverture de la dramaturgie du mois de juillet 2017 au plus fort de la crise entre le président de la République Emmanuel Macron et le Chef d’état-major des armées (CEMA) Pierre de Villiers, finalement contraint à la démission, a offert un échantillon de cette absence de distance critique de nombre des journalistes du domaine face à leur objet d’analyse et aux acteurs le constituant. Dans une déroutante inversion des normes démocratiques, le pouvoir civil élu s’est fait contester par le plus haut gradé de l’appareil militaire. Ce dernier a vu sa démarche être relayée de manière étonnamment uniforme par de nombreux journalistes spécialisés sur la défense. En novembre 2017, ces mêmes journalistes continuent de couvrir de louanges l’ancien CEMA dans le cadre de la promotion de son livre[24] qui s’inscrit pourtant dans le même mouvement de pression corporatiste, administratif et industriel que la crise du mois de juillet.

Un des procédés discursifs privilégiés des tenants du militarisme consiste à étiqueter d’emblée leurs (rares) contradicteurs éventuels de doux rêveurs irresponsables sombrant dans l’irrationnel des utopies. Militaristes et sécuritaristes opèrent un véritable rapt sémantique s’octroyant le monopole du sérieux et de la raison pour qualifier systématiquement leurs prescriptions de bonnes, naturelles et nécessaires, pour reprendre le triptyque communicationnel mis en évidence par les critiques du militarisme[25]. Parés de ces postulats, les ravisseurs peuvent alors se draper dans une forme de condescendance leur faisant l’économie du débat. Mieux encore cette condescendance se trouve parfois exhibée sur le marché des idées sous le terme de pédagogie. Ces gens-là ne s’affichent pas comme les défenseurs d’intérêts spécifiques participant au renforcement du pouvoir d’une poignée de groupes sociaux, non, ils exposent pourquoi, comme un fait établi (selon eux, du moins), la chose militaire est la priorité, la valeur supérieure en société. Dans leur optique, les militaristes ne font ainsi que consentir à rappeler des évidences dans une œuvre d’éducation du public[26].

Dans ces discours, d’autres sphères d’intervention publique peuvent évidemment participer des priorités étatiques. C’est le cas notamment l’appareil sécuritaire qui incarne un marché connexe pour l’industrie défense ainsi qu’un relais de croissance appréciable. Hormis la sécurité, les autres missions de l’État sont cependant systématiquement présentées comme étant secondaires et appelées à s’éclipser devant le caractère prioritaire et en fait sacré de la fonction défense.

Les instruments à la disposition des lobbies militaristes sont nombreux et s’accommodement aisément de quelques raccourcis sur le plan de la logique. Ainsi la règle non contraignante de l’OTAN voulant que les États membres allouent au moins 2 pourcents de leur PIB à leur défense est exploitée pour faire admettre comme impératif le fait d’augmenter les dépenses militaires des pays membres de l’Union européenne[27].

Cet objectif des 2 pourcents ne peut cependant être pleinement compris qu’en le considérant comme une manœuvre politicienne tenant du lobbyisme. En effet, au niveau des logiques budgétaires, il ne fait aucun sens de déterminer les moyens d’accomplissement d’une mission publique par l’application a priori d’un pourcentage sur une valeur aussi variable que la richesse nationale. Les moyens de se prémunir des menaces planant sur une société ne se facturent pas en points de PIB. Si la règle de l’OTAN sert de leitmotiv aux lobbies industriels et administratifs de la défense, c’est parce qu’elle permet dans une certaine mesure de faire l’économie du débat budgétaire et, par-là, de la justification des sommes allouées à la défense. Une telle démarche aurait pour conséquence de sanctuariser de manière proportionnelle à la richesse nationale la part revenant à la défense. C’est donc ailleurs, c’est-à-dire sur toutes les autres missions de l’État qu’il faudrait rechercher des ajustements pour faire face à l’imprévu ou tout simplement pour financer de nouvelles orientations politiques.

Chose amusante, les experts du domaine semblent parfois confondre l’objectif des 2 pourcents avec celui d’arrimer les moyens de la défense au contexte stratégique et aux ressources disponibles. C’est le cas, par exemple, de Malcom Chalmers, chercheur au think tank britannique RUSI. Réagissant sur Twitter à un référé de la Cour de comptes française[28], il se satisfait d’apprendre que finalement la France respecte depuis 2016 la règle des 2 pourcents[29]. Pourtant, pour arriver à ce résultat le personnel de la Cour des comptes n’a pas créé de recettes supplémentaires pour la défense française. Il a plutôt proposé d’inclure dans la déclaration que la France achemine à l’Alliance l’ensemble des données que les règles comptables de l’OTAN prennent en considération[30], ce que d’autres États membres ne manquent pas de faire, d’ailleurs.

La Cour invite aussi les acteurs participant à l’élaboration du budget de la défense française à faire preuve de davantage de sincérité en ce qui concerne les provisions allouées à certaines missions, notamment aux opérations extérieures. On peut penser que ces dernières ne sont pas prévisibles et c’est effectivement le cas, mais pour partie seulement. Année après année et alors que les mêmes opérations perdurent, le gouffre se creuse entre les provisions et les dépenses pour atteindre actuellement un rapport de 1 pour 3 (450 millions EUR de budget pour à 1,3 milliard EUR de dépenses, la différence étant régulièrement prise en charge par les autres ministères)[31]. En France, l’insincérité budgétaire en matière de défense est devenue chronique au point de relever d’une forme de pathologie.

Par ailleurs, la hausse qui découlerait de la règle otanienne des 2 pourcents est présentée comme un vecteur d’une autonomie stratégique pour l’Europe. Elle rejoint un ensemble de mesures communautaires adoptées en 2017 comme l’annonce d’un budget à Bruxelles pour le financement de la recherche et du développement des armements[32] ou encore la conclusion d’une entente à 23 (et non à 27 et donc encore moins à 28) sur la Coopération structurée permanente en matière de défense qu’on présente à l’occasion comme un nouveau pilier de l’identité européenne[33].

Pourtant une des problématiques liées à la défense communautaire reste la même, à savoir le dédoublement dont elle est porteuse par rapport aux mécanismes de l’OTAN. Or, de nombreux États européens restent fermement attachés aux garanties américaines de sécurité qu’apporte l’Alliance via la crédibilité de l’appareil de dissuasion sans équivalent offert par Washington, tant sur un plan conventionnel que nucléaire. De plus, la tendance à surinterpréter les impacts de la moindre évolution affectant la coopération communautaire en matière de défense occulte le fait que la notion d’autonomie stratégique appliquée à l’Union européenne demeure encore concrètement largement vide de contenu[34] et que toute progression dans ce sens ne peut que heurter une autre autonomie stratégique : celle des États membres, notamment celle de la France où ce concept à valeur de dogme.

Ni le récent accord à 23 ni le budget communautaire appelé à financer des projets de recherche et de développement en armements ne sont suffisants pour qu’il en aille autrement à court et moyen terme. Toutefois, l’intérêt de ces mesures pour les lobbies militaristes demeure. Il s’agit de transposer progressivement à l’échelle communautaire les mécanismes des captations des budgets publics que, dans plusieurs États européens, les industriels de la défense ont réussi à redessiner dans un sens qui leur est favorable. Le mécanisme est d’autant plus aisé à justifier auprès des décideurs publics que la défense demeure un domaine qui échappe aux règles de l’Organisation mondiale du commerce quant aux financements des acteurs économiques. Un des problèmes de ce modèle de financement est d’orienter la recherche et le développement vers les besoins des États en matière de surveillance, de répression et de violence armées quand les innovations et les perspectives de croissance les plus porteuses se trouvent du côté des individus consommateurs et des firmes du secteur commercial[35].

Conclusion : quelle légitimité pour une construction européenne inégalitaire et militariste ?

En 1992, l’Europe s’est reconfigurée autour d’un traité de Maastricht qui supposait des avancées conséquentes dans les relations entre les États membres à de multiples niveaux (économie, finances, sécurité, droits sociaux…). Or, la croissance économique de la seconde moitié des années 1990 et jusqu’à la crise de 2008 a servi de prétexte à l’inaction. Il était apparemment urgent de ne rien faire pour ne pas entraver l’économie, comme si l’action politique, celle consistant à faire, était forcément un facteur d’inquiétude pour la croissance. Mieux il fallait défaire les mesures de protection sociales dans les États membres au nom d’un impératif de compétitivité. Plutôt que de garantir des minima sociaux, l’Union européenne a participé à la mise en concurrence des travailleurs européens (et même des chômeurs) tout comme les pressions baissières sur les régimes de taxation au nom de la compétitivité ont créé un nivellement par le bas des garde-fous mis en place contre les soubresauts de l’économie mondiale. L’ensemble a « détricoté » les solidarités sociales construites au fil du temps.

Malgré la crise de 2008, l’Union européenne reste prisonnière de cette double habitude de laisser-faire et de défaire. Elle ne consent à des aménagements marginaux que lorsque le système qu’elle a contribué à façonner menace de s’écrouler ou fait état de risques majeurs pour toute une génération de leaders politiques soudainement soucieuse de sa place dans l’histoire de la (dé)construction européenne.

Sur un plan matériel, les politiques européennes (celles de l’Union comme celles de la plupart de ses membres) organisent la concurrence des travailleurs européens entre eux. Elles opposent le travailleur au chômeur, le chômeur au pauvre n’étant même plus considéré au niveau statistique comme étant en recherche d’emploi et même le pauvre du pays membre au pauvre migrant qui s’est en plus parfois endetté pour payer son passage clandestin au péril de sa liberté et même de sa vie. La logique consiste à faire des moyens de subsistance de ceux qui sont tout en bas un risque de déclassement pour ceux qui sont à peine plus haut et de répéter ainsi la logique pour chaque strate de la société. Cloisonnées par des corporatismes et des communautarismes instaurant autant de plafonds de verre indépassables (où est passé l’ascenseur social ?), les sociétés européennes ont fait du sacrifice des moins possédant la condition de l’adaptation aux logiques de compétitivité d’une économie mondialisée.

En associant un libéralisme économique porteur d’inégalités au militarisme, la tendance actuelle dessine une hiérarchie politique, économique et sociale à deux têtes où se trouvent, d’un côté, les oligarques de la finance et, de l’autre, les acteurs de la défense et la sécurité, la relation entre les deux réactivant du même coup les thèses marxistes les plus caricaturales quant au rôle de la violence étatique et sa relation avec les acteurs dominants de l’économie. En disqualifiant toutes les autres options démocratiques à force d’une démagogie occasionnellement travestie en pédagogie, les pyromanes libéraux-militaristes de la société ont réussi à faire admettre qu’ils étaient les seuls connaissant suffisamment le feu pour endosser le rôle de pompiers.

S’il était exact de parler de déficit démocratique en Europe dans les années 1990, une génération plus tard, il convient davantage de parler d’une allergie des acteurs de la construction européenne à la démocratie et aux principes essentiels qui la garantissent comme la transparence ou l’imputabilité. Il importe en effet ici de rappeler une évidence malheureusement occultée : soumettre les peuples au dictat du marché et de la préservation des privilèges de quelques-uns en leur faisant assumer au passage les coûts de leur surveillance et de leur répression est un projet politique incompatible avec les notions de gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple, de justice et de liberté. Il s’agit d’un projet autoritaire.

La structuration et la pérennisation des rapports de forces qui en découlent annonce un monde particulièrement dangereux, non pas uniquement en raison du terrorisme ou d’une éventuelle agression étatique, mais du fait des crispations sociales dans un monde où, sous l’effet de l’introduction de nouvelles technologies de la robotisation et de l’intelligence artificielle, la capacité d’un grand nombre d’Européens et d’Européennes à vendre leur force de travail sur un marché de l’emploi atrophié s’annonce particulièrement difficile. Loin de préparer l’Europe à cet avenir, les acteurs de la construction européenne paraissent empêtrés dans des méthodes et des délais qui, s’ils étaient déjà problématiques dans la dernière décennie du 20e siècle, sont totalement dépassés au moment d’aborder la 3e décennie du 21e siècle.

Plus grave, depuis le temps que partout en Europe des experts et autres acteurs indépendants de la société civile s’évertuent à informer les décideurs politiques des conséquences économiques, sociales et environnementales des mesures qu’ils promeuvent, on peut tout simplement questionner leur volonté de servir le bien commun. Trop d’acteurs-clés de la construction européenne n’étant jamais imputables de rien, surtout pas devant un suffrage électoral, le doute est permis.

Peut-on dans ce contexte mourir pour l’Europe ? Oui, mais en y étant contraint. Ce serait un sacrifice de plus, le dernier celui-là. Il y a quelque chose de désolant et de particulièrement frustrant pour un Européen convaincu à en arriver à dresser ce constat. La responsabilité de la situation n’incombe cependant pas à celui qui l’expose, mais à ceux et celles qui par leurs actions conduisent la construction européenne dans cette voie.

Vouloir relancer le projet européen par la poursuite de politiques porteuses d’inégalités en associant à la démarche un processus de militarisation des enjeux, ce n’est pas agir pour le bien commun, c’est lui nuire. On peut espérer doter l’Europe d’un bras armé et souhaiter des évolutions allant dans ce sens. Toutefois, si la poursuite de cette ambition se fait en dehors de toute réflexion sur les liens de solidarité économiques et sociaux au sein d’un ensemble européen plus intégré et enfin démocratique, cette option porte en elle des germes dangereux.

 

Yannick Quéau

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Photographie : montage du drapeau de l’Union européenne et d’un panneau de signalisation routière indiquant une impasse. Crédit : OSINTPOL d’après Union européenne/Domaine public et Sécurité routière française/CC.BY-CA.3.0.

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Pour citer ce document

Yannick Quéau, « Les impasses d’une construction européenne par la peur », Décryptage d’OSINTPOL, 27 novembre 2017.

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Références

[1] Voir Yannick Quéau, « L’intelligence du bien commun », Décryptage d’Osintpol, 14 juillet 2015.

[2] « Amnistie internationale dénonce les dérives de l’État d’urgence en France », Les Échos, 31 mai 2017.

[3] Alain Juillet, « Sous la pression de la pensée unique, nous sommes devenus des adeptes du grand écart », Libération.fr, 26 octobre 2015.

[4] Sur la coopération en Europe en matière de terrorisme voir Chantal Lavallée, « Lutte contre le terrorisme ne Europe : la coopération dans tous ses états », Décryptage d’Osintpol, 3 juin 2016

[5] Estelle Pattée, « Lois antiterroristes en Europe : Amnesty dénonce une atteinte aux libertés individuelles », Libération, 17 janvier 2017.

[6] Franck Johannès, « La Cour européenne des droits de l’homme rendra une décision sur la loi renseignement – Le dossier en droit », Libertés surveillées, Libertes.blog.lemonde.fr, 16 mai 2017.

[7] Matt Apuzo et Stephen Erlanger, « Patriot Act Ideas Rises in France, and is Ridiculed », New York Times, 16 janvier 2015.

[8] Raphael Bossong, The Evolution of EU Counter-Terrorism: European Security Policy after 9/11, 2013, Londres, Routledge.

[9] Yannick Quéau, « Entre paresse et propagande : la Nouvelle Guerre froide », Blog Paix, armement, défense et sécurité – PADS, Osintpol.org, 19 octobre 2016.

[10] Selon les données compilées par le Stockholm International Peace Research Institute — SIPRI — et sur la base d’un calcul en USD constants de 2015.

[11] Yannick Quéau, « La modernisation des armements russes : un ambition contrariée », Magazine Diplomatie, Les grands dossiers numéro 40, août-septembre 2017, p. 86-87.

[12] Puis l’actrice après avoir accordé l’asile politique au lanceur d’alerte.

[13] Selon le libellé en français de l’article 5 du traité consultable sur le site internet de l’OTAN.

[14] Yannick Quéau, Loc. Cit.

[15]  Bram Vranken, « Securing Profits: How the Arms Lobby is Hijacking Europe’s Defence Policy », Vredesactie.be, octobre 2017.

[16] Termes dérivés des concepts anglais de militarization et securitization.

[17] Barry Buzan, Ole Wæver et Jaap de Wilde, Security: A New Framework for Analysis, Boulder, Lynne Rienner Publishers, 1998, p. 25.

[18] Jef Huysmans, « Dire et écrire la sécurité : le dilemme normatif des études de sécurité », Cultures & Conflits, nos 31-32, printemps-été, 1998, p. 177.

[19] Jef Huysmans, « Desecurization and the Aesthetics of Horror in Political Realism », Millennium, Vol. 27, No. 3, 1998, p. 580.

[20] Didier Bigo explique cette centralité des professionnels par le capital symbolique dont ils disposent et la capacité institutionnelle à formuler la sécurité. Voir Didier Bigo, Police en réseaux, l’expérience européenne, Paris, Presses de Sciences Po, 1996.

[21] Yannick Quéau, « Entre guerre et terreur : principes et acteurs du militarisme et du sécuritarisme en France », Note d’analyse d’Osintpol, 18 décembre 2015, p. 5.

[22] Voir Claude Serfati :« L’acharnement à justifier les dépenses de défense sur la base de leur utilité pour le système productif va à l’encontre de toute réalité contemporaine », propos recueillis par Yannick Quéau, Décryptage d’Osintpol, 11 avril 2017.

[23] Jean-Dominique Merchet cité dans Clémence de Blasi, « Profession : Journalistes de défense », Revue Charles, no 23, automne 2017.

[24] Pierre de Villiers, Servir, Paris, Fayard, 2017.

[25] Voir sur ce thème Anna Stravrianakis et Jan Selby (Dir.), Militarism and International Relations : Political economy, Security and Theory, London/Routledge, 2013.

[26] Voir par exemple, Nathalie Guibert, « Quand la dissuasion nucléaire resurgit dans le débat stratégique », Lemonde.fr, 16 janvier 2017. La journaliste présente en cette occasion  l’essai d’un certain Nicolas Roche portant sur la dissuasion nucléaire. Elle écrit : « Pour les experts du secteur – le lobby nucléaire selon un autre point de vue –, une œuvre de pédagogie s’impose. » On remarque sous la plume de la journaliste la fusion des fonctions d’expert, de lobbyiste et de pédagogue. Ce que l’article ne précise pas en dehors de vagues généralités sur une carrière de fonctionnaire, c’est le parcours de Nicolas Roche. Or, celui-ci n’est pas anodin puisque peu de temps avant la publication de l’article, le pédagogue occupait le poste de directeur de la stratégie militaire du Commissariat à l’énergie atomique, c’est-à-dire le laboratoire nucléaire militaire français. En l’absence d’un étiquetage éthique des intervenants du débat public ; pédagogie et justification de ses mandats et même des budgets de son employeur s’affichent ainsi parfois comme des synonymes jusque dans les lignes du journal du Décodex, cet outil de validation des sources d’information créé par d’autres journalistes du quotidien Le Monde. Voir également Yannick Quéau, « Véritologues, pédagogues et autres enjeux de pouvoir », Blog Paix, armement, défense et sécurité – PADS, Osintpol.org, 13 février 2017.

[27] Aude-Emmanuelle Fleurant : « Ajuster le fardeau militaire de Berlin à 2 % du PIB ferait de l’Allemagne le premier partenaire européen de l’OTAN, et de loin », propos recueillis par Yannick Quéau, Décryptage d’Osintpol, 24 avril 2017.

[28] Didier Migaud, « Référé Mise en œuvre de la Loi de programmation militaire 2014-2019 et perspectives de la mission Défense », Cour des comptes, 19 juillet 2017 (rendu public le 23 novembre 2017)

[29] Les propos de Malcom Chalmers sont précisément les suivants : « Perhaps France is catching up with UK’s more inclusive reporting practices to NATO. Good news in any case if France is now at 2 %. » Ce qui donne en français : « Peut-être que la France se rapproche des normes plus inclusives du Royaume Uni en matière de reporting à l’OTAN. Bonne nouvelle dans tous les cas si la France est désormais à 2 pourcents. » [Traduction libre]. Voir Twitter, 25 novembre 2017.

[30] Le référé de la Cour de comptes stipule à cet égard que « les modalités actuelles de déclaration, se limitant aux crédits budgétaires votés en loi de finances initiale, apparaissent restrictives au regard de l’ensemble des dépenses concourant à l’effort de défense incluant les surcoûts directs et indirects des interventions extérieures et intérieures (surcoûts des opérations extérieures et missions intérieures au-delà de la dotation budgétaire, opérations de maintien de la paix, missions militaires de la gendarmerie, pensions militaires d’invalidité) et le financement de recherche et développement au bénéfice du secteur militaire. L’inclusion de ces dépenses, que permettrait le cadre défini par l’OTAN et les pratiques d’autres États membres, conduirait à constater que les dépenses de défense de la France atteignent d’ores et déjà 2,00 % en 2016, ce qui mériterait d’être valorisé dans la communication internationale. » Didier Migaud, Loc.Cit.

[31] Jean Guisnel, « Budget militaire : offensive estivale de Bercy », Lepoint.fr, 12 juillet 2017.

[32] Hassan Meddah, « L’Europe prêtre à investir jusqu’à 1,5 milliard d’Euros par an dans son industrie de défense », LUsine nouvelle, 8 juin 2017.

[33] Teri Schultz, « Can PESCO Provide a new European Identify? », Dw.com, 13 novembre 2017.

[34] La communication de novembre 2017 mentionne par exemple que la coopération structurée permanente porte sur des « engagements communs ambitieux plus contraignants » pris par les États membres, y compris « l’augmentation régulière, en termes réels, des budgets consacrés à la défense afin d’atteindre les objectifs convenus ». Ces derniers restent cependant encore flous.

[35] Claude Serfati, Loc. Cit. Voir également Paul Holden et al. Seven Myths that sustain the global arms trade, Zed Books, London, 2016.

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